Suivre la température des océans sur place et depuis l’espace
Écrit par : Florina Jacob et Laura Bastide
Pourquoi suivre la température de l’eau en zones de restauration corallienne ?
La santé des coraux est fortement liée à la température de l’eau. En effet, les conséquences de la hausse des températures sur les coraux peuvent être multiples et s’enchaîner: les coraux sont stressés, risquant le blanchissement puis la mort. Connaître les variations de température permet d’adapter les décisions de conservation des les décisions pour aider à conserver les coraux, ce qui est au cœur des actions des projets accompagnés par Coral Guardian.
Comment peut-on suivre la température de l’eau dans notre zone de restauration corallienne ?
Cela peut se faire avec des capteurs installés directement dans l’eau sur nos zones de restauration, dont les équipes locales prélèvent des données régulièrement. Afin de suivre les évolutions des températures, à la fois du passé mais aussi en temps réel et à des échelles différentes, on peut utiliser les observations et prévisions satellitaires de services d’observations des océans comme le Copernicus Marine Service.
Localement, pour le projet autour de l’île de Hatamin, l’équipe a installé des capteurs de température sous l’eau à plusieurs endroits de l’aire marine protégée, entre 2 et 6 mètres de profondeur. Les capteurs peuvent être réglés pour collecter les températures périodiquement de façon automatique (sur Hatamin, les relevés sont faits toutes les 3 heures). L’équipe récupère les données toutes les semaines, afin de suivre de près les tendances et adapte les mesures de restauration des coraux en fonction de ces données.
Afin de compléter ces relevés effectués en mer, notre équipe peut s’appuyer sur des mesures des paramètres océaniques réalisés par satellites et mis à disposition par le Copernicus Marine Service. Ce service d’observation des océans propose plusieurs outils d’information sur l’état des océans : données à télécharger, cartes interactives avec les tendances de plusieurs variables dans le temps, des rapports issus des analyses, et indicateurs des océans dans les dernières décennies.
Relier les données du terrain avec les données satellitales permet de comparer les relevés effectués localement avec les tendances régionales. Il s’agit d’effectuer un travail complémentaire pour mettre en perspective les données trouvées par nos équipes.
Par exemple, nous avons comparé la tendance mensuelle des températures d’eau dans notre zone de restauration à Hatamin selon le suivi du terrain et le suivi satellitaire de Copernicus Marine Services des 8 derniers mois (Figure 1). Les deux montrent la même tendance : après une hausse des températures anormale en octobre et en novembre, l’eau est devenue plus fraîche pendant la saison des pluies pendant janvier et février (heureusement !). Avec la fin des pluies, depuis le mois de mars les eaux se réchauffent. Les deux groupes de données suivent des tendances similaires, sauf pour le mois de mai, où les températures sur le terrain apparaissent plus hautes par rapport aux données satellitales, d’où l’importance de suivre dans les deux échelles. Avec ces informations, l’équipe locale suit de près nos coraux pour signaler de possibles événements de blanchissement. Mais pour le moment ils tiennent le coup, avec moins de 10% de la couverture corallienne suivie à Hatamin qui présente blanchissement corallien.
Figure 1. Comparaison entre les moyennes de température d’eau autour de l’île Hatamin, recensées sur le terrain par l’équipe Coral Guardian avec des capteurs (ligne jaune), et avec les données satellitales proposés par Copernicus Marine Services (ligne bleue). Les barres sont les déviations standard. Crédits des données satellitaires : EU Copernicus Marine Service information (DOI : https://doi.org/10.48670/moi-00052).
Quels autres programmes de suivi des températures de l’eau existent ?
Les tendances d’anomalies de température mentionnés avant ont aussi été signalées par d’autres programmes d’observation satellitaire, spécialisée dans les alertes pour le blanchissement corallien, comme le Coral Reef Watch développé la NOAA (l’Agence Américaine d’Observation Océanique et Atmospherique). Ce programme propose des services d’information et de visualisation globale et régionale des températures d’eau à travers d’observations satellitaires, en lien avec la santé des récifs coralliens. Il propose des produits qui montrent l’accumulation de stress thermique en zones coralliennes et notifie ces utilisateurs à travers des alertes hebdomadaires. En particulier, pour la période analysée (Fig 1), il y a eu des alertes de blanchissement pendant novembre, décembre 2022 et mars 2023.
Figure 2. Produit NOAA Coral Reef Watch de la NOAA à East Nusa Tenggara pour 2022-2023, série chronologique de stations virtuelles régionales par satellite à 5 km. Température de surface de la mer (SST – “Sea Surface Temperature”), degrés-semaines de réchauffement (DHW – “degree heating weeks”) et données sur le niveau de stress (couleurs, alerte de blanchissement). Les alertes au blanchissement dépendent du point chaud à 5 km (zones où la SST est supérieure à la moyenne mensuelle maximale) et des DHW à 5 km (accumulation de stress thermique dans la zone au cours des 12 dernières semaines). Pour voir l’interprétation complète de ces indicateurs, cliquez ici. Source : NOAA Coral Reef Watch Version 3.1.
Il existe donc de nombreux outils de suivi et visualisation des données satellitaires, tous avec des utilités et avantages différents.
A l’avenir, il serait possible d’utiliser ces données satellitaires pour connaître des tendances et comprendre les facteurs d’explication du blanchissement des coraux, par exemple, connaître le seuil de tolérance aux vagues de chaleurs afin de mieux prévenir les impacts que celles-ci ont sur les coraux. L’avantage des données satellitaires est qu’elles peuvent être consultées en temps réel, sur de plus grandes échelles de temps mais aussi à plus grande échelle spatiale ce qui permettrait d’anticiper le déplacement de certaines vagues de chaleurs marines. La vidéo ci-après montre par exemple une récurrence de vagues de chaleur forte en novembre et avril-mai dans les alentours de l’île de Hatamin (région de Nusa Tenggara, Indonésie) sur les deux dernières années, ce qui nous permet d’anticiper une potentielle vague de chaleur en novembre 2023 qui risque de toucher toute cette région.
Vidéo 1. Vidéo de l’évolution de la température de l’eau dans la zone autour de l’île de Hatamin (région Nusa Tenggara, Indonésie) entre juin 2021 et juin 2023. Généré avec E.U. Copernicus Marine Service Information https://doi.org/10.48670/moi-00016.
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